Quand la contraception fait baisser la lactation

Mise en cause de la pilule

Etude du cas clinique

Cette mère a accouché à terme d’un petit garçon, Maxence de 3,500 kg.
L’allaitement démarre bien dès la naissance. A 2 mois, Maxence pèse 5,300 kg.
A partir de 2 mois et demi, il boit peu et ne réclame pas. La mère pense qu’il doit être plus efficace au sein et ne s’inquiète pas mais à la pesée suivante, la PMI pointe du doigt le fait que le bébé n’a pas pris de poids en trois semaines et demande à la mère de donner des biberons de complément.
La mère choisit de ne pas donner de biberon mais d’insister pour que Maxence tète plus souvent et le poids repart à la hausse.

La mère fait appel à moi lorsque son bébé a presque 4 mois car il s’énerve au sein depuis une semaine.
Au début, cela ne concerne que les tétées du matin puis petit à petit cela s’étend à toutes les tétées. Le bébé s’énerve de plus en plus et se met à hurler en cours de tétée, lâche le sein et refuse de le reprendre. Il dort mal la nuit et pleure.
La mère s’inquiète pour son bébé et pour sa lactation.

Mon intervention

Au cours de la consultation, je regarde la bouche du bébé et sa succion qui ne posent aucun problème. La prise de sein est parfaite.
Par contre, le bébé pleure au sein au bout de quelques minutes.

Lorsque je demande à la mère si elle prend des médicaments en ce moment, elle m’indique qu’elle a commencé à prendre la pilule Cérazette il y a une semaine.
La coïncidence avec le début des pleurs de Maxence est troublante…

J’explique à la mère que, bien que cette pilule soit considérée comme compatible avec l’allaitement, elle entraîne chez certaines femmes une baisse de la lactation. Je lui propose donc d’essayer d’arrêter la prise de cette pilule pour voir si cela améliore la situation.
La mère est d’accord pour essayer.

Une semaine plus tard, la situation s’est bien améliorée et le bébé ne pleure plus au sein. Il s’agite un peu mais continue à téter.
Une semaine plus tard, la situation est complètement rentrée dans l’ordre et la prise de poids du bébé est de retour à la normale.
Chez cette femme, c’est donc bien la prise de la pilule qui a déclenché la baisse de lactation.

Pilule ou mauvaise prise du sein ?

Etude du cas clinique

Cette mère a accouché 2 jours après terme d’un petit garçon, Amaury de 3,980 kg.
C’est le deuxième allaitement de cette mère qui a allaité son fils aîné sans problème.
L’allaitement démarre bien à la maternité et la mère et l’enfant rentrent à la maison à J3 avec un allaitement exclusif.

Mais la mère enchaîne pendant quelques jours des engorgements sur les deux seins alternativement, avec de la fièvre. Le médecin consulté prescrit des antibiotiques. Le bébé pleure beaucoup et perd du poids.
La mère commence alors à donner une préparation pour nourrisson en complément à la seringue puis au biberon.

Elle fait appel à moi lorsque son bébé a 4 semaines car elle souhaite revenir à un allaitement exclusif. Pour le moment il prend 300 ml par jour de préparation pour nourrisson.

Mon intervention

Je demande à la mère si elle prend des médicaments. Elle m’indique qu’elle prend du Galactogyl, du fénugrec, des tisanes d’allaitement et la pilule Cérazette depuis 2 semaines.

Je regarde la succion du bébé qui est parfaite. Mais son palais a une forme de bulle et la langue est courte. Amaury est également rétrognate. Par contre il ouvre très bien la bouche.
Je regarde une tétée et je m’aperçois qu’Amaury prend mal le sein, il referme la bouche.
J’explique à la mère comment améliorer la prise du sein en position de madone inversée et Amaury prend alors très bien le sein. Il déglutit immédiatement mieux.

Je propose alors à la mère d’améliorer la prise du sein à chaque tétée, de proposer le sein au moins toutes les deux heures en journée et toutes les trois heures la nuit, d’augmenter la dose de fénugrec et d’arrêter la prise de la pilule. Je lui propose également de ne donner que 60 ml de complément, uniquement quand Amaury semble clairement insatisfait après les tétées.

La mère met tout cela en place. Au bout de quinze jours, le bébé tète toujours très souvent mais il n’a plus besoin de compléments.
Au bout d’un mois, je propose à la mère de reprendre la pilule si elle le souhaite. Elle fait l’essai et cela ne pose aucun problème pour sa lactation.

Chez cette femme, c’est la mauvaise prise du sein qui a provoqué un mauvais drainage du sein et donc les engorgements du début. La lactation s’est mal mise en place et j’ai proposé à la mère d’arrêter la pilule pour mettre toutes les chances de son côté pour relancer la lactation. Une fois la lactation en place, elle a pu reprendre la pilule sans souci.

Bibliographie
  • Jack Newman et Teresa Pitman, L’allaitement, comprendre et réussir, Jack Newman Communications, 2006.
  • Marsha Walker, Breastfeeding management for the clinician, Using the evidence, Jones and Bartlett Publishers, 2006.
  • Thomas Hale, Medications and Mothers’Milk, Hale Publishing, 2013.
  • LLL France, Contraception par pilule progestative et baisse de la sécrétion lactée : 8 cas, Dossiers de l’allaitement n°52, 2002.
  • LLL France, Allaitement et régulation des naissances, Dossiers de l’allaitement n°60, 2004.

Dernière mise à jour : 30 janvier 2017 par