Réflexe d’éjection fort (REF)

Cas clinique n°1 de REF

Cette mère a accouché à terme d’une petite fille, Alice, de 3,510 kg. L’allaitement a démarré avec des douleurs des mamelons à chaque tétée. Le personnel à dit à la mère qu’il était normal d’avoir mal en début d’allaitement.
La mère est donc rentrée chez elle avec un bébé qui se portait bien mais qui lui faisait mal à chaque tétée. Petit à petit la douleur a diminué sur le sein droit mais a persisté sur le sein gauche.
A deux semaines, la mère a déclaré une mastite sur le sein droit. Celle-ci est passée en 48 heures mais la mère a constaté une baisse importante de lactation sur ce sein. Elle a donc multiplié les mises au sein de ce côté et la lactation est revenue à la normale en une semaine.

À quatre semaines, la mère me contacte car elle continue à souffrir à toutes les tétées sur le sein gauche. Elle a commencé à remplacer certaines tétées par un tire-lait pour soulager son mamelon douloureux. Elle tire 100 ml de lait sur ce sein en quelques minutes à chaque tirage.

J’observe la bouche et la succion du bébé qui ne présentent aucune particularité. Le bébé est capable de très bien ouvrir la bouche et sa succion est parfaite. Par contre, lorsque j’observe une tétée, je m’aperçois que le bébé referme la bouche sur le sein, essentiellement parce qu’il est mal placé : Alice doit baisser la tête pour pouvoir prendre le mamelon.
Lorsqu’elle lâche le sein, je vois apparaître sur le mamelon gauche un point plus clair qui pourrait faire penser à une petite ampoule ou à un canal bouché.

Je montre à la mère comment placer son bébé pour qu’elle puisse ouvrir grand la bouche pour prendre le sein. Au niveau de la douleur, l’amélioration est immédiate même si le mamelon reste toujours un peu douloureux. Par contre je me rends compte que le bébé doit déglutir très vite et voudrait se reculer pour mieux gérer le flux de lait.
Je propose alors à la mère de donner deux tétées d’affilée sur le même sein et de vider un peu le sein avant de changer de côté pour que les tétées soient plus confortables pour son bébé et qu’Alice n’essaie pas de refermer la bouche sur le sein pour limiter le flot de lait.
Je propose également à la mère de faire des pansements au lait maternel pour soigner le mamelon gauche.

La mère me rappelle trois jours plus tard : les pansements et l’amélioration de la prise du sein ont permis une amélioration très nette des douleurs, même si la prise du sein n’est pas encore tout à fait confortable. Alice commence à avaler un peu moins vite au sein. Je suggère donc à la mère de continuer comme ça.

J’ai des nouvelles dix jours plus tard : les douleurs ont complètement disparu et la mère continue à donner deux tétées d’affilée sur le même sein. Le bébé ne s’étouffe plus au sein et ne cherche plus à refermer la bouche.

Dans ce cas, l’excellente succion du bébé a permis de faire diminuer un peu une lactation très abondante et un reflexe d’éjection du lait un peu trop puissant (REF), du à la pression du lait, sans aucun risque pour le bébé.

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Cas clinique n°2 de REF

Cette mère a accouché à terme d’une petite fille, Thémis, de 2,580 kg. C’est son septième enfant et elle connaît bien l’allaitement puisqu’elle a allaité tous ses enfants. Mais Thémis n’arrive pas à prendre le sein. Des bouts de sein en silicone sont proposés à la maternité. L’allaitement démarre ainsi mais il est très douloureux. Des crevasses apparaissent (malgré les bouts de sein en silicone).

En quelques jours, la mère déclenche des douleurs sous forme de brûlures dans les deux seins. Elle pense à une candidose mammaire, traitée par sa sage-femme au fluconazole. La douleur de la mère diminue sous traitement mais ne disparaît pas.
La mère réussit à enlever les bouts de sein en silicone. Les crevasses se guérissent petit à petit sur le sein gauche mais sur le sein droit, une grosse crevasse persiste.

Le médecin prescrit une crème antibiotique qui ne suffit pas pour que la crevasse disparaisse. Un traitement avec la pommade tous usages du Dr Newman est mis en place pendant deux semaines. La mère trouve qu’il y a du mieux mais que ce n’est pas parfait.

La mère vient me voir en cabinet lorsque son bébé a presque trois mois. Elle n’en peut plus des douleurs et cherche une solution.
J’observe le bébé : il présente un petit frein de langue de type IV qui ne semble pas vraiment poser de problème. Par contre Thémis mord mon doigt tellement fort que la douleur est vive, j’imagine donc très bien quelle douleur elle déclenche au sein de sa mère. Elle n’ouvre pas assez la bouche et paraît très tendue.
Au sein, la mère la place bien mais elle n’ouvre pas assez la bouche, resserre très fort les mâchoires et je m’aperçois qu’elle lâche le sein très souvent en raison d’un réflexe d’éjection du lait très fort. Elle cherche ainsi à gérer le flux de lait. A chaque reprise du sein la douleur est plus forte et la mère ne peut plus la supporter.

Je suggère alors de suspendre les mises au sein pendant quelques jours, de tirer le lait et de le donner au bébé pour laisser le temps aux mamelons de cicatriser et pour apaiser la douleur. Je suggère également de changer de taille de téterelles de tire-lait car les siennes ne sont pas adaptées à la taille de ses mamelons et occasionnent des douleurs. La quantité de lait est abondante et doit le rester pour que Thémis réussisse à manger suffisamment.
Je suggère aux parents de voir avec leur ostéopathe s’il peut aider Thémis à desserrer ses mâchoires.

L’ostéopathe n’arrive pas à améliorer la situation, Thémis continue à serrer autant. La mère essaie de la remettre au sein après cinq jours d’interruption. Les crevasses sont cicatrisées et les douleurs ont disparu. Par contre, dès la première tétée, celles-ci reviennent et le bébé continue à lâcher le sein régulièrement pour cause de réflexe d’éjection trop fort (REF).

La mère décide alors de garder une mise au sein par jour et de tirer son lait le reste de la journée pour maintenir les douleurs à un niveau acceptable.

Dans le cas de ce bébé, il est hors de question de faire diminuer la lactation car c’est justement cette hyperlactation qui lui permet de manger suffisamment. Par contre ce sont les douleurs qui ont eu raison des mises au sein.

 

Bibliographie pour le REF

  • Marsha Walker, Breastfeeding management for the clinician, Jones and Bartlett Publishers, 2006.
  • Dr Jack Newman et Teresa Pitman, L’allaitement, comprendre et réussir, Jack Newman communications, 2006, pages 204 et 230.
  • Allaiter Aujourd’hui n°78, LLLF, janvier/février/mars 2009.
  • Les dossiers de l’Allaitement n°77, LLLF, page 6, octobre/novembre/décembre 2008.
  • Les dossiers de l’Allaitement n°62, LLLF, janvier 2005.
  • Les dossiers de l’Allaitement n°74, LLLF, janvier 2008.

 

Dernière mise à jour : 19 mai 2023 par Véronique Darmangeat