Sevrage en cas d’hyperlactation

Cas clinique n°1

Cette mère accouche trois semaines avant terme d’une petite fille de 2,670 kg.
Le début de l’allaitement est difficile. Le bébé n’arrive pas à prendre le sein, la maternité propose à la mère d’utiliser des bouts de sein en silicone. Le bébé prend alors le sein mais fait très mal à sa mère.
La montée de lait se fait dès J2.

La mère rentre chez elle à J3 et essaie d’enlever les bouts de sein en silicone mais les tétées sont extrêmement douloureuses.

La mère fait appel à moi trois semaines après la naissance car elle souffre beaucoup et son bébé tète très souvent, elle se demande si c’est normal.
J’observe la bouche du bébé et je remarque que le palais est en gouttière, la langue est courte avec un frein peu élastique et surtout le bébé serre très fort les mâchoires. Cette petite fille n’ouvre que très peu la bouche.
Elle prend donc le sein en pinçant très fort le mamelon. Celui-ci est pincé et décoloré lorsque le bébé lâche le sein.

La courbe de poids est bonne car la maman a beaucoup de lait et le bébé réussit à prendre au sein le lait qui coule tout seul. Comme elle ne peut pas stimuler le sein correctement pour obtenir plus de lait au cours de la tétée, elle tète très souvent pour obtenir sa ration.

Je suggère à la mère de voir un ostéopathe pour aider le bébé à desserrer les mâchoires et un ORL pour envisager la section du frein de langue. Je lui explique également comment réaliser des pansements au lait maternel pour soigner ses mamelons.

Une semaine après, l’ORL procède à la section du frein de langue. Cela améliore nettement la succion du bébé qui continue cependant à pincer. La mère décide donc d’emmener sa fille chez un ostéopathe la semaine suivante. L’amélioration est immédiate et les crevasses guérissent.

La mère me recontacte lorsque son bébé a cinq mois car elle reprend le travail et souhaite s’organiser pour que sa fille prenne son lait à la crèche.
À six mois, le bébé commence à manger des solides et continue à prendre des biberons de lait maternel à la crèche.

À six mois et demi, la mère souhaite commencer à sevrer et introduit un biberon de préparation pour nourrisson à la crèche en supprimant un tirage de lait. Mais à partir de ce moment là, les seins s’engorgent et deviennent vite très douloureux.
Je suggère à la mère de reprendre le tirage, juste pour soulager les seins, sans drainer complètement. Par la suite, je lui suggère de diminuer progressivement les tirages puis les tétées. Je lui suggère également de prendre des infusions de sauge officinale pour aider à la diminution de la lactation.

Deux mois plus tard, la mère a réussi à supprimer les tirages et les tétées mais les seins restent tendus, malgré l’utilisation quotidienne de la sauge. Je suggère à la mère de ne plus y toucher s’ils ne sont pas douloureux.
Une semaine plus tard, le sevrage est complètement terminé.

Chez cette femme, l’hyperlactation a été visible dès le deuxième jour avec une montée de lait précoce. Elle a permis à son bébé de prendre du poids correctement malgré une succion et une prise du sein défaillantes. Par contre, elle a rendu le sevrage long et douloureux puisqu’il a fallu plus de deux mois pour que le sevrage soit terminé, avec l’aide de la sauge.

Cas clinique n°2

Cette mère a accouché deux semaines avant terme d’un petit garçon de 3,800 kg.
La montée de lait se fait à J3. Elle est extrêmement douloureuse et la maternité conseille à la mère de tirer son lait en plus des tétées pour soulager les seins.

La mère rentre chez elle à J4. À partir du lendemain, elle enchaine les épisodes d’engorgement et de mastites sur les deux seins alternativement.

Elle fait appel à moi à douze jours. Elle tire alors son lait après chaque tétée et réveille son bébé toutes les deux heures car ses seins ne peuvent pas supporter un intervalle plus grand. Elle tire 200 ml sur la journée pour ne pas surstimuler les seins mais les soulager. Elle a mal aux seins en permanence et n’en peut plus. Le bébé a pris 600g en cinq jours.

En l’interrogeant sur ses antécédents, j’apprends qu’elle présente un prolactinome et que son taux de prolactine est nettement plus élevé que la normale.
Son bébé tète très bien mais avale très vite. Il est vite submergé de lait et ne peut donc pas drainer les seins suffisamment.

Nous convenons d’essayer la méthode du drainage complet. Elle tire son lait une première fois avec un bon tire-lait électrique, mais ses seins sont tellement tendus qu’elle tire difficilement 150 ml et a la sensation de ne pas avoir drainé ses seins suffisamment. Les 24 heures suivantes, les seins sont un peu plus souples mais le surlendemain, la situation est revenue à son point de départ.
Nous essayons un second drainage complet trois jours après le précédent, les résultats ne sont pas meilleurs. La mère est épuisée et ne supporte plus la douleur permanente. Elle souhaite sevrer complètement.

Je suggère à la mère de voir avec son médecin l’utilisation de cabergoline pour stopper l’allaitement et je lui fournis de la documentation pour le médecin. Celui-ci refuse d’envisager la prise de cabergoline et la prise de Bromocriptine permet à la mère de sevrer en quelques jours.

La mère est soulagée mais aurait souhaité avoir de l’information pendant la grossesse sur l’influence d’un prolactinome sur la lactation.

Bibliographie

  • Pour la méthode du drainage complet :
    Caroline GA van Veldhuizen-Staas, International  Breastfeeding Journal, août 2007.
  • Pour l’hyperlactation :
    • Allaiter Aujourd’hui n°78, LLLF, janvier/février/mars 2009.
    • Les dossiers de l’Allaitement n°77, LLLF, page 6, octobre/novembre/décembre 2008.
  • Pour le prolactinome
    • Les dossiers de l’Allaitement n°22, LLLF, page 19, janvier 1995.
    • Les dossiers de l’Allaitement n°44, LLLF, page 14, juillet 2000.
    • Les dossiers de l’Allaitement n°70, LLLF, page 19, janvier 2007.

Dernière mise à jour : 18 avril 2017 par