Accompagner l’allaitement n’est pas promouvoir l’allaitement

Frein de langue familial

Etude du cas clinique

Cette mère me contacte lors de sa 3e grossesse.
L’allaitement de ses aînés s’est mal passé.
Son aîné ne savait pas téter, avait eu de gros problèmes de prise de poids , elle avait eu des crevasses importantes et avait poursuivi tant bien que mal un allaitement mixte jusqu’aux 5 mois de son bébé. Un frein de langue trop court avait été diagnostiqué trop tard pour rattraper l’allaitement, et coupé.

Elle voulait absolument allaiter exclusivement son deuxième enfant. Le frein de langue trop serré a été coupé dès la maternité mais la mère a quand même eu des crevasses. Elle a ensuite fait des mastites à répétition, été traitée par antibiotiques et a décidé de sevrer au bout d’un mois et demi en se promettant qu’elle n’allaiterait plus jamais un autre enfant.

Mon intervention

Elle vient me voir alors qu’elle est enceinte de son troisième enfant. Elle avait décidé de ne plus jamais tenter l’allaitement mais elle n’arrive pas à s’imaginer ne pas allaiter son bébé.
Elle souhaite donc avoir des informations pour débuter au mieux cet allaitement, savoir comment réagir vite en cas de souci, s’assurer que je serai disponible pour une consultation rapidement et surtout se laisser la possibilité d’arrêter si cela se passe mal.
Ses mamelons sont déjà sensibles et irrités pendant la grossesse, elle redoute donc des douleurs rapides.Lorsque nous faisons le point, je comprends que le père a lui aussi un frein de langue serré, comme ses deux aînés. J’explique donc à la mère qu’il est possible que son troisième bébé ait lui aussi un frein de langue serré et qu’il serait intéressant de le vérifier dès les premiers jours.
Je réexplique à la mère comment positionner son bébé au sein, comment réagir en cas de douleurs. Je lui propose d’hydrater ses mamelons dès maintenant pour qu’au moment de la naissance, ils ne soient plus irrités.
Et surtout je l’assure d’un soutien rapide en cas de souci et de l’aider à sevrer son bébé dès qu’elle le souhaite sans chercher à la pousser à allaiter.Pour cette mère, c’est cette dernière assurance qui lui permet de prendre le risque de l’allaitement pour ce troisième bébé.

Jumelles prématurées

Ousmane Sow

Etude du cas clinique

Cette mère me contacte au cours de son 3e mois de grossesse.
Elle est enceinte de jumelles, veut que l’allaitement se passe bien et est inquiète parce que tout le monde lui dit qu’il n’est pas possible d’allaiter des jumeaux.
Elle va accoucher en province, près de chez ses parents et je ne pourrai donc pas venir l’aider.

Nous revoyons ensemble tous les éléments nécessaires à un bon démarrage de l’allaitement pour des jumeaux et je lui parle également de l’éventualité de la prématurité et que faire dans ce cas là. Je lui explique comment démarrer la lactation avec de l’expression manuelle et un tire-lait en complément jusqu’à la montée de lait. Je lui parle de la méthode expliquée par Jane Morton. La mère est confiante et se dit que l’allaitement devrait bien se passer.

Mon intervention

La mère accouche à 34 semaines d’aménorrhée. Les bébés sont placés en couveuse dans 2 hôpitaux différents car pas dans les mêmes services, et la mère commence à tirer son lait avec un tire-lait toutes les 3 heures comme indiqué par l’hôpital. Elle me contacte pour me dire que pas une goutte ne sort. Je lui explique que l’expression manuelle les premiers jours est plus efficace pour exprimer du colostrum et je lui rappelle comment faire.

Elle me recontacte le lendemain : le deuxième hôpital lui a dit que l’expression manuelle ne servait à rien et lui a fourni un autre tire-lait, “plus efficace” puisqu’elle obtient maintenant quelques gouttes de colostrum. Mais elle m’explique que ses mamelons sont pelés et qu’elle a des crevasses. Je lui demande quel est le modèle du tire-lait et elle m’explique qu’il s’agit d’un Kitett Matic avec des téterelles jetables donc en taille standart, alors que je lui avais indiqué qu’elle avait besoin de téterelles en 30 mm. Elle me dit qu’elle veut arrêter parce que l’allaitement dans ces conditions ne sera pas possible.
Je comprends tout à fait que ces douleurs ne soient pas supportables. Je lui explique quand même qu’elle peut essayer l’expression manuelle qui ne devrait pas être douloureuse mais elle préfère arrêter, je n’insiste pas et lui explique comment gérer la montée de lait qui devrait arriver dans les jours suivants.

3 jours plus tard, elle me recontacte car elle a une douleur dans un sein et se dit que c’est peut-être la montée de lait et qu’elle a encore un espoir d’allaiter ses filles.
Je lui réexplique la méthode du drainage combiné et comment soulager la douleur. Cela fonctionne bien pour elle et elle est heureuse de me dire 2 heures plus tard que ça marche !

5 jours plus tard, elle obtient 250 ml de lait par 24h et s’inquiète de la quantité produite. Je lui propose de faire avec elle un emploi du temps pour qu’elle réussisse à tirer son lait plus souvent et je lui propose de voir avec son médecin l’opportunité de prendre du fenugrec.

5 jours plus tard, elle ne réussit pas à tirer plus de 8 fois par 24h, ce qui est déjà bien si l’on considère qu’elle a deux bébés dans deux hôpitaux différents et qu’elle doit donc faire de nombreux trajets. Elle tire 350 ml par 24h et les quantités n’augmentent plus. Mais elle est déjà contente de pouvoir donner ce lait à ses bébés et je la félicite de tout ce qu’elle a mis en œuvre.

Dans le cas de cette mère, c’est le mauvais démarrage de la lactation puis quelques jours sans stimulation qui n’ont pas permis de mettre en place une lactation complète.
Mais la mère a eu besoin de quelques jours pour se remettre de ses douleurs et réussir à se remettre au tire-lait.

Bibliographie
  • Mannel, Martens, Walker, Core curriculum for Lactation Consultant Practice, Jones and Bartlett Learning, 2013.

Dernière mise à jour : 26 janvier 2017 par Véronique Darmangeat