Prise de poids faible

Clémentine

 

prise de poids faible

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Etude du cas clinique

Cette mère accouche à terme de son troisième enfant, une petite fille de 3800 g, Clémentine.
L’allaitement démarre bien à la maternité et, à deux semaines, Clémentine pèse 3900g.
Le médecin rassure la mère, son allaitement est sur de bons rails.
A deux mois, Clémentine pèse 4600. Le médecin indique à la mère que la prise de poids est insuffisante et lui demande de donner des compléments de préparation pour nourrisson.

La mère fait appel à moi une semaine plus tard, Clémentine a deux mois et une semaine. Sa mère va reprendre le travail et veut savoir comment poursuivre l’allaitement à la reprise du travail.
Elle n’arrive pas à tirer son lait avec un tire-lait électrique et n’y arrive qu’avec le tire-lait manuel Medela Harmony. Elle s’inquiète de savoir comment faire au travail.

Mon intervention

Elle m’explique que Clémentine fait de petites tétées fréquentes, qu’elle a des selles irrégulières, ne prend qu’un seul sein par tétée, dort 6 h d’affilée la nuit.
Elle n’est pas inquiète pour la courbe de poids et m’explique que ses autres enfants ont aussi eu une courbe de poids basse et qu’elle ne s’inquiète donc pas.
Je lui explique alors que le cas de Clémentine est plus préoccupant que celui de ses frères car elle devrait peser 1200 g de plus que son poids actuel.
J’observe Clémentine et je m’aperçois qu’elle présente un frein de langue serré. Quand elle tète, elle creuse les joues à chaque mouvement de succion et s’arrête de téter dès que le lait ne coule plus tout seul et qu’elle doit fournir un effort qu’elle n’arrive pas à fournir.

J’explique alors à la mère que le frein de langue de Clémentine l’empêche d’avoir une succion efficace et d’obtenir assez de lait. De ce fait, la lactation a diminué et Clémentine obtient de moins en moins de lait au fil des jours.
Je lui propose de voir l’ORL du Centre allaitement pour faire sectionner le frein de langue.
Je lui propose également de donner les deux seins à chaque tétée, d’utiliser la compression du sein, et de tirer son lait avec son tire-lait manuel après la tétée pour donner le lait tiré à Clémentine en plus des tétées.
Enfin, je lui parle de deux plantes pour essayer de relancer la lactation : le fénugrec et le moringa.
Nous voyons également comment faire avec la reprise du travail pour continuer à stimuler au mieux la lactation : la mère peut rentrer allaiter Clémentine sur sa pause du midi mais elle ne peut pas tirer son lait au travail, elle prévoit donc de donner une préparation pour nourrisson.

Le frein de langue est sectionné le lendemain, contre l’avis du pédiatre qui assure qu’il ne faut pas y toucher avant l’âge de 5 ans. La mère met en place tous les points envisagés ensemble.
Une semaine plus tard, Clémentine tète plus efficacement et prend très difficilement 50 ml de lait maternel tiré, après les tétées. Cependant, elle n’a pris que 100 g en une semaine.
La mère sent ses seins plus remplis.

Quelques jours plus tard, Clémentine est vue en consultation par la remplaçante du pédiatre habituel. Elle n’a pas pris de poids du tout. La pédiatre pense que Clémentine souffre de RGO et prescrit du Gaviscon à chaque tétée. Elle dit à la mère de continuer le même protocole de mise au sein/lait tiré. Mais Clémentine a beaucoup de mal à prendre le lait tiré en plus des tétées, alors qu’elle prend très bien le biberon quand la mère s’absente. La mère en déduit qu’elle n’a plus faim après les tétées.
Je demande à la mère de m’envoyer une petite vidéo de sa fille au sein pour voir si la succion s’est améliorée : Clémentine est désormais bien efficace au sein.

Quelques jours plus tard, chez la pédiatre, elle a commencé à reprendre du poids, sous Gaviscon. La pédiatre pense donc que le problème de prise de poids vient du RGO et recommande à la mère de ne pas insister sur les biberons si Clémentine n’en veut pas. Par ailleurs elle demande à la mère de tester avec Clémentine la préparation pour nourrisson qui sera donnée à la crèche, pour s’assurer que Clémentine la supporte.

La mère me recontacte quand Clémentine a 3 mois.
Le traitement anti-reflux a été adapté. L’adaptation à la crèche s’est bien passée et Clémentine supporte bien ses deux biberons par jour de préparation pour nourrisson, les autres tétées ne sont plus jamais complétées et Clémentine tète bien. Elle prend désormais 40 g par jour !

Chez Clémentine, plusieurs facteurs combinés ont conduit à une prise de poids insuffisante : un frein de langue qui ne permettait pas une succion efficace, et un RGO important qui empêchait Clémentine de reprendre du poids.

 

Jean

prise de poids faible

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Fritz Zuber-Buhler

Etude du cas clinique

Cette mère accouche quatre semaines avant terme de jumeaux, Louis et Jean. Elle a déjà allaité son fils aîné et souhaite vivement allaiter ses jumeaux. L’allaitement démarre très bien pour Louis qui n’a aucun problème pour téter et grossit bien et régulièrement.
Par contre, Jean a beaucoup de mal à se nourrir : il n’arrive pas à prendre le sein et très vite des compléments au biberon sont proposés à la maternité.
Le poids de naissance de Jean est de 2600g.

Les parents me contactent quand les jumeaux ont 11 semaines car, si tout va bien pour Louis, Jean ne prend toujours pas le sein et met une heure et demi pour boire 60 ml au biberon.
La mère tire son lait pour le nourrir. Elle voudrait vraiment qu’il reprenne le sein. Elle me parle d’emblée d’utiliser un DAL au sein.

Mon intervention

J’observe Jean qui n’ouvre que très peu la bouche, y compris lorsqu’il baille.
De plus, je m’aperçois qu’il présente un frein de langue postérieur extrêmement serré, qui lui interdit tout mouvement de la langue. Je n’ai jamais observé un tel frein précédemment et je me rends compte qu’il est très difficile à identifier pour quelqu’un qui n’en aurait pas l’habitude. D’ailleurs le pédiatre consulté a dit qu’il n’y avait aucun problème de frein de langue…
Lorsque je propose mon doigt à téter à Jean, il mord très fort mon doigt. Si je mets du lait dans sa bouche en même temps, il a beaucoup de mal à déglutir car sa langue ne bouge pas.
Il réussit à prendre entre 300 et 400 ml de lait au biberon par jour en y passant entre 10 et 12 heures par 24 heures.
Je propose aux parents de peser Jean qui n’a pas été pesé depuis 3 semaines : il pèse 4600g.

J’explique aux parents que dans les conditions actuelles, Jean est incapable de prendre le sein. Il a besoin de voir un ORL pour sectionner le frein de langue et de voir un ostéopathe pour l’aider à ouvrir la bouche.

Deux jours plus tard, Jean est de retour au Centre allaitement pour voir l’ORL. Mais la situation se complique : Jean a déjà beaucoup de mal à ouvrir la bouche mais dès que l’ORL soulève la langue, la bouche se ferme automatiquement et l’ORL ne peut rien faire. Nous décidons donc que je vais maintenir la bouche de Jean ouverte le temps pour l’ORL de sectionner le frein. Même ainsi, nous devons nous y reprendre à plusieurs reprises pour réussir la section du frein. Là aussi c’est une première pour l’ORL qui n’a jamais rencontré une telle situation.
Après la section du frein, Jean refuse de manger et s’endort.
Le lendemain, l’ostéopathe du Centre allaitement voit Jean.

La mère me recontacte 6 jours plus tard : Jean arrive désormais à boire son biberon en 20 minutes. Par contre il refuse toujours le sein.
Une semaine plus tard, en peau à peau, Jean accepte de léchouiller le sein, mais pas plus. Dès que sa mère essaie de lui mettre dans la bouche, il pleure et arrête tout. Par contre au biberon, il réussit désormais à boire des biberons de 40 à 120 ml et il régurgite beaucoup moins qu’avant. Mais sur 24h, il ne boit toujours que 450 ml et refuse absolument de boire plus.
Je demande donc à la mère de faire peser Jean.
La mère voudrait se passer des biberons, je lui propose donc d’essayer désormais le DAL au doigt pour inciter Jean à bien placer sa langue.

Le poids de Jean à 3 mois est de 4750 g. C’est un peu juste et je propose à la mère de le réveiller une fois la nuit pour lui faire prendre une ration supplémentaire.

A 16 semaines, Jean pèse 5190 g, le poids est bien reparti à la hausse. Par contre, il refuse totalement le DAL au doigt, alors qu’il sait désormais très bien se servir de sa langue. Il n’accepte de manger qu’au biberon.

Ce bébé de petit poids a un petit appétit mais sa courbe reste tout à fait correcte : elle est régulière et sans réelle cassure bien qu’elle reste en dessous du 3e percentile de l’OMS.
Par contre, pour le moment, il refuse de manger autrement qu’au biberon.


Bibliographie

  • J Riordan, K Auer-bach , Breastfeeding and Human Lactation, Ed Jones and Barlett. 2015.
  • R A Lawrence, Breastfeeding : a guide for the medical profession, Elsevier, 2015.
  • Marsha Walker, Breastfeeding Management for the clinician, Jones and Bartlett Publishers, 2016.
  •  Jack Newman et Teresa Pitman, L’allaitement, comprendre et réussir, Jack Newman Communications, 2006.

 

Dernière mise à jour : 16 octobre 2017 par Véronique Darmangeat