Quand la mère perd trop de poids

Cas clinique n°1

Cette mère a accouché à terme d’un petit garçon.

Elle fait appel à moi à trois semaines car son bébé régurgite beaucoup, elle a de fortes douleurs aux mamelons pendant les tétées et son médecin a diagnostiqué une mastite sur son sein droit. Son bébé a également des maux de ventre avec des selles vertes et explosives.

J’observe la bouche du bébé et une tétée : la succion est parfaite et le bébé ne présente aucun problème buccal. Par contre, il n’ouvre pas suffisamment la bouche pour téter et provoque des douleurs à sa mère.
J’explique à la mère comment améliorer la mise au sein, les douleurs disparaissent quasi instantanément.

Cependant, le bébé a du mal à supporter l’importante quantité de lait reçue à chaque mouvement de succion. Je propose à la mère d’utiliser des tisanes de sauge pour faire baisser la lactation et de ne donner qu’un sein par tétée, puis de donner plusieurs tétées sur le même sein. La mère met ces conseils en pratique et finit par donner le même sein huit heures d’affilée.

L’allaitement se poursuit bien mais la mère doit faire attention en permanence pour éviter les engorgements et les mastites. Le bébé est sevré à deux ans.

La mère me téléphone à la naissance de son deuxième enfant pour les mêmes problèmes de surproduction de lait. Nous revoyons ensemble la conduite à tenir et l’allaitement se poursuit sans problème.

Un an plus tard, je retourne voir cette mère, j’ai du mal à la reconnaître car elle a beaucoup maigri. Elle m’explique que depuis la naissance de sa fille, elle ne cesse de perdre du poids. Elle se sent faible et tombe malade très facilement. Les analyses demandées par son médecin sont normales. La mère mesure 1,65 m et pèse alors 45 kg.
Je lui propose d’augmenter son apport en protéines et en céréales complètes et de faire des collations supplémentaires en cours de journée.

Un mois plus tard, la situation ne s’est pas améliorée, la mère a encore perdu 500 grammes.
Elle décide alors d’arrêter l’allaitement. Nous mettons en place un programme de sevrage progressif en raison de son gros risque d’engorgement.
Deux mois plus tard, le sevrage est complet.
À ce jour, quatre mois plus tard, la mère a repris deux kilos. Nous espérons que le poids va continuer à remonter.

Cas clinique n°2

Cette mère a accouché d’un petit garçon, à terme. L’allaitement se passe bien malgré un réflexe d’éjection du lait très fort. Le bébé grossit bien mais la mère sent qu’elle a beaucoup de mal à maintenir son poids et qu’elle doit manger beaucoup plus qu’en temps normal.

Elle fait appel à moi pour la naissance de son second fils car ce bébé a du mal à grossir suffisamment.

À l’observation, je m’aperçois que ce bébé a un palais très haut, associé à un reflexe nauséeux très proche. Comme sa mère a toujours beaucoup de lait, avec un réflexe d’éjection puissant, il se contente de boire le lait qui coule tout seul, sans faire d’effort pour téter correctement. Il a donc du mal à obtenir du lait quand il doit stimuler le sein après le premier réflexe d’éjection.

Je montre à la mère comment améliorer la mise au sein. Ce n’est pas parfait car le bébé ne supporte pas que le mamelon se place au fond de sa bouche, cela déclenche son réflexe nauséeux. J’explique alors à la mère comment utiliser la compression mammaire pour aider le bébé à obtenir le lait dont il a besoin. Je lui suggère également de proposer le sein plus souvent.

Ainsi, le bébé reprend du poids correctement.
Par contre, sa mère commence à perdre du poids. Je fais un bilan précis de ce qu’elle mange avec elle. Comme nous sommes à son domicile, elle peut me montrer ce qu’elle mange, je peux constater que ses apports sont déjà supérieurs à la normale. Je lui suggère d’augmenter volontairement ses apports caloriques et de multiplier les collations. Son poids continue à descendre. Avant la grossesse, elle pesait 55 kg pour 1,70 m. Quatre mois après la naissance, elle pèse 50 kg. Je lui conseille de consulter son médecin, qui ne trouve rien pour expliquer cette perte de poids mais lui prescrit des compléments en fer, magnésium et vitamine D.

Elle décide de poursuivre l’allaitement jusqu’aux six mois de son bébé avant de prendre une décision quand à la poursuite de cet allaitement.

Aux six mois du bébé, elle pèse 49 kg et se plaint beaucoup d’être fatiguée mais elle souhaite poursuivre l’allaitement.

Aux neuf mois du bébé, elle pèse 47 kg et décide d’arrêter l’allaitement. Je lui explique comment sevrer et je lui suggère de continuer à faire très attention à ses apports caloriques. Son poids remonte petit à petit.
Un an après le sevrage, elle a retrouvé ses 55 kg et sa vitalité.

La perte de poids excessive chez la mère pendant l’allaitement est rare et le plus souvent inexpliquée. Elle ne pose aucun problème sur la prise de poids du bébé. Après le sevrage, le poids remonte en général sans problème. Chez certaines femmes, la fatigue et la vulnérabilité dues à cette perte de poids nécessite le sevrage de l’enfant. C’est souvent très difficile à vivre pour ces mères car ce sevrage s’impose à elles, même si elles ne le souhaitaient pas.

À ma connaissance, il n’existe pas de littérature sur le sujet. Si vous avez connaissance d’articles sur ce sujet, je vous serai très reconnaissante de me les faire parvenir à contact@allaiteraparis.fr.

Dernière mise à jour : 19 avril 2017 par